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Saturday 15 November 2014

Les jihadistes marocains tentés par l'Etat islamique

[File] Des combattants de l'EIIL à Diyala posent pour une photo publiée sur des sites web jihadistes le 1er novembre 2013.
[File] Des combattants de l'EIIL à Diyala posent pour une photo publiée sur des sites web jihadistes le 1er novembre 2013.
Terrorisme 2014-11-14

Les jihadistes marocains tentés par l'Etat islamique

Analyse de Mawassi Lahcen à Casablanca pour Magharebia – 14/11/2014

Pour le mouvement marocain de la Salafiya Jihadiya, l'ascension de l'EIIL pourrait signifier se prononcer pour ou contre la violence.

Les Marocains se sont longtemps sentis à l'abri des violences jihadistes dans les pays voisins, mais l'arrivée de l'Etat islamique (EIIL) les pousse à ressentir les risques de violence dans leur pays, plus encore qu'ils ne l'auraient imaginé.

Par suite de la récente conversion des jihadistes expatriés aux thèses de l'EIIL, les observateurs s'attendent à un changement qualitatif de l'activité terroriste au Maroc.

Dans un revirement qui en a surpris plus d'un, les leaders marocains des groupes jihadistes en Syrie ont récemment déclaré leur allégeance au groupe, alors que jusqu'à présent, ils avaient affiché une parfaite neutralité concernant la lutte entre al-Qaida en Syrie (Jabhat al-Nusra) et l'Etat islamique.

Les analystes s'attendent maintenant à ce que ce changement d'attitude des Marocains combattant à l'étranger pousse le mouvement de la Salafia Jihadia au Maroc à tomber dans les bras de l'EIIL, le rendant ainsi plus violent et sanglant.

Les leaders religieux radicaux les plus connus dans le pays ont jusqu'à présent rejeté le "califat" auto-proclamé de l'Etat islamique. Mohamed Abdelouahab Rafiki (alias Abou Hafs) a critiqué la violence, tandis qu'un autre imam radical marocain, Omar Haddouchi, a condamné le fait de s'associer avec "un inconnu sur une terre inconnue".

Mais selon Cheikh Mohamed Fizazi, il reste encore aux salafistes marocains à choisir une idéologie commune sous la bannière de laquelle ils puissent se regrouper.

"Le salafisme au Maroc revêt différentes formes. Leur seul problème est qu'ils ne suivent pas une seule école de pensée ou une seule voie", avait expliqué l'ancien leader du mouvement salafiste jihadiste marocain à Magharebia en juillet dernier.

Mais aujourd'hui, ils sont nombreux à s'unir en Syrie. Depuis la mi-octobre, plusieurs groupes opérant en Syrie au sein de Jabhat Ansar al-Din ont annoncé leur adhésion à l'EIIL.

Un ralliement qui concerne entre autres le groupe jihadiste inspiré par al-Qaida Sham al-Islam, dont le fondateur marocain Brahim Benchekroune a été tué en avril dernier en Syrie. Le 8 novembre, Salman Arjani a déclaré qu'il se rendait à Raqqa en compagnie d'une centaine de combattants pour prêter allégeance à l'organisation d'Abu Bakr al-Baghdadi.

Arjani, de nationalité saoudienne, est considéré comme le cerveau idéologique à l'origine du mouvement Sham al-Islam.

Quelques jours plus tôt, le Marocain Jawad Achraf, alias Abu Anas al-Andalusi, avait lui aussi annoncé qu'il rejoignait l'EIIL, un ralliement fait en compagnie de plusieurs émirs alliés au groupe jihadiste marocain.

Or, ces dirigeants avaient compté aux rangs des détracteurs les plus sévères de l'Etat islamique.

Le changement d'attitude de ces personnalités devrait avoir un écho important au Maroc.

Selon le politologue Abdellah Rami, le serment d'allégeance des chefs des combattants marocains en Syrie divisera les éléments salafistes jihadistes au Maroc, entre ceux qui sont favorables à l'EIIL et à al-Baghdadi, et ceux qui restent fidèles à al-Qaida Central et à Ayman al-Zawahiri.

"La déclaration d'allégeance à l'organisation d'al-Baghdadi par les leaders idéologiques et de terrain en Syrie aura un fort impact au Maroc", explique-t-il.

"Elle conduira à la mise à l'écart de leaders locaux comme Omar Haddouchi et d'autres", ajoute Rami.

Il prédit que le Maroc assistera à l'avenir à l'émergence de brigades affiliées à l'EIIL, qui auront recours aux mêmes méthodes que celles utilisées en Syrie et en Irak.

Un bain de sang au Maroc ?

Mohamed Benhammou, président de la Fédération africaine d'études stratégiques (FAES), met également en garde contre le fait que les salafistes jihadistes marocains pourraient adopter les méthodes et le comportement de l'EIIL dans le royaume.

"L'EIIL considère le meurtre et le bain de sang comme un but en soi. L'organisation terroriste conseille à ses membres d'utiliser tous les moyens disponibles pour atteindre ses objectifs, des attentats suicides aux autres méthodes de meurtre", explique-t-il à Magharebia.

"L'Etat islamique est l'organisation terroriste la plus sanguinaire et la plus brutale. Ils glorifient les massacres et le meurtre et en font le cœur même de leur foi", ajoute-t-il.

Pour sa part, l'analyste et militant amazigh Boubaker Ounghir s'inquiète du fait que ce mouvement pro-EIIL au Maroc ne vienne créer des préoccupations sécuritaires jusqu'alors inconnues.

"Bien que ce mouvement représente une réelle menace pour tous les Marocains par suite de ses idées, qui autorisent le meurtre de chacun, les minorités ethniques et religieuses au Maroc seront les plus exposées à ces risques", explique-t-il à Magharebia.

En Syrie et en Irak, l'Etat islamique a essentiellement tourné ses fusils et ses couteaux contre les minorités kurdes et chrétiennes, souligne ce militant. Et il est fort probable que les partisans de ce groupe terroriste suivront la même tendance au Maroc.

Les militants amazighs ont déjà été visés par des fatwas appelant à répandre leur sang, rappelle-t-il. Les citoyens juifs et chrétiens sont également menacés.

Et si le nombre des récentes arrestations de terroristes peut fournir une indication, le danger est croissant.

Le Maroc a en effet enregistré une augmentation du nombre des éléments actifs de l'EIIL sur son territoire. Les magistrats de Salé ont été récemment surpris d'entendre des déclarations de militants marocains arrêtés en liaison avec les combats en Syrie.

Ces accusés ont en effet déclaré qu'ils considéraient la société marocaine comme hérétique et ne reconnaissaient pas la légitimité de ses tribunaux.

Une cellule avait également planifié des opérations terroristes au Maroc visant des sites militaires et de la sécurité, des intérêts économiques et étrangers, et plusieurs personnalités connues.

Ce report d'allégeance au bénéfice de l'EIIL se retrouve même dans les prisons.

Certains détenus dans des affaires terroristes, comme Mohamed Fartakh et Abdel Ilah Ahram, ont diffusé depuis leurs cellules des enregistrements audio dans lesquels ils déclarent leur allégeance à al-Baghdadi. Ces déclarations publiées sur les sites des réseaux sociaux ont été baptisées "Soutien marocain à l'Etat islamique".

Au cours du seul dernier mois, plusieurs autres arrestations ont montré que le royaume a des raisons de s'inquiéter. Un Marocain, ses deux jeunes filles et une femme avec laquelle il avait contracté un mariage "orfi" ont été arrêtés le 15 octobre avant de pouvoir rejoindre leurs contacts de l'Etat islamique à l'étranger.

Un autre suspect a été arrêté à Al-Hoceima pour avoir publié sur Internet des propos faisant l'apologie des "opérations terroristes sauvages" commises par l'EIIL en Irak et en Syrie, a indiqué le ministère de l'Intérieur.

Un autre homme encore, dans la trentaine, a été appréhendé à Oujda. Il avait prêté allégeance à l'EIIL et appelait sur Internet à mener des "opérations de destruction".

Il avait également passé dix ans en prison pour son rôle dans les attentats de Casablanca en 2003.

Face à de tels développements, le Maroc a relevé son niveau de vigilance à son maximum. La semaine dernière, le gouvernement a mis en place de nouvelles mesures de sécurité combinant l'armée, la police et les forces para-militaires.

Le pays n'est pas confronté au risque de menaces directes et tangibles dans un futur proche, mais prudence et vigilance sont néanmoins nécessaires face au terrorisme, a déclaré le ministre de l'Intérieur Mohamed Hassad.

Pour le mouvement marocain de la Salafiya Jihadiya, l'ascension de l'EIIL pourrait signifier se prononcer pour ou contre la violence.

Les Marocains se sont longtemps sentis à l'abri des violences jihadistes dans les pays voisins, mais l'arrivée de l'Etat islamique (EIIL) les pousse à ressentir les risques de violence dans leur pays, plus encore qu'ils ne l'auraient imaginé.

Par suite de la récente conversion des jihadistes expatriés aux thèses de l'EIIL, les observateurs s'attendent à un changement qualitatif de l'activité terroriste au Maroc.

Dans un revirement qui en a surpris plus d'un, les leaders marocains des groupes jihadistes en Syrie ont récemment déclaré leur allégeance au groupe, alors que jusqu'à présent, ils avaient affiché une parfaite neutralité concernant la lutte entre al-Qaida en Syrie (Jabhat al-Nusra) et l'Etat islamique.

Les analystes s'attendent maintenant à ce que ce changement d'attitude des Marocains combattant à l'étranger pousse le mouvement de la Salafia Jihadia au Maroc à tomber dans les bras de l'EIIL, le rendant ainsi plus violent et sanglant.

Les leaders religieux radicaux les plus connus dans le pays ont jusqu'à présent rejeté le "califat" auto-proclamé de l'Etat islamique. Mohamed Abdelouahab Rafiki (alias Abou Hafs) a critiqué la violence, tandis qu'un autre imam radical marocain, Omar Haddouchi, a condamné le fait de s'associer avec "un inconnu sur une terre inconnue".

Mais selon Cheikh Mohamed Fizazi, il reste encore aux salafistes marocains à choisir une idéologie commune sous la bannière de laquelle ils puissent se regrouper.

"Le salafisme au Maroc revêt différentes formes. Leur seul problème est qu'ils ne suivent pas une seule école de pensée ou une seule voie", avait expliqué l'ancien leader du mouvement salafiste jihadiste marocain à Magharebia en juillet dernier.

Mais aujourd'hui, ils sont nombreux à s'unir en Syrie. Depuis la mi-octobre, plusieurs groupes opérant en Syrie au sein de Jabhat Ansar al-Din ont annoncé leur adhésion à l'EIIL.

Un ralliement qui concerne entre autres le groupe jihadiste inspiré par al-Qaida Sham al-Islam, dont le fondateur marocain Brahim Benchekroune a été tué en avril dernier en Syrie. Le 8 novembre, Salman Arjani a déclaré qu'il se rendait à Raqqa en compagnie d'une centaine de combattants pour prêter allégeance à l'organisation d'Abu Bakr al-Baghdadi.

Arjani, de nationalité saoudienne, est considéré comme le cerveau idéologique à l'origine du mouvement Sham al-Islam.

Quelques jours plus tôt, le Marocain Jawad Achraf, alias Abu Anas al-Andalusi, avait lui aussi annoncé qu'il rejoignait l'EIIL, un ralliement fait en compagnie de plusieurs émirs alliés au groupe jihadiste marocain.

Or, ces dirigeants avaient compté aux rangs des détracteurs les plus sévères de l'Etat islamique.

Le changement d'attitude de ces personnalités devrait avoir un écho important au Maroc.

Selon le politologue Abdellah Rami, le serment d'allégeance des chefs des combattants marocains en Syrie divisera les éléments salafistes jihadistes au Maroc, entre ceux qui sont favorables à l'EIIL et à al-Baghdadi, et ceux qui restent fidèles à al-Qaida Central et à Ayman al-Zawahiri.

"La déclaration d'allégeance à l'organisation d'al-Baghdadi par les leaders idéologiques et de terrain en Syrie aura un fort impact au Maroc", explique-t-il.

"Elle conduira à la mise à l'écart de leaders locaux comme Omar Haddouchi et d'autres", ajoute Rami.

Il prédit que le Maroc assistera à l'avenir à l'émergence de brigades affiliées à l'EIIL, qui auront recours aux mêmes méthodes que celles utilisées en Syrie et en Irak.

Un bain de sang au Maroc ?

Mohamed Benhammou, président de la Fédération africaine d'études stratégiques (FAES), met également en garde contre le fait que les salafistes jihadistes marocains pourraient adopter les méthodes et le comportement de l'EIIL dans le royaume.

"L'EIIL considère le meurtre et le bain de sang comme un but en soi. L'organisation terroriste conseille à ses membres d'utiliser tous les moyens disponibles pour atteindre ses objectifs, des attentats suicides aux autres méthodes de meurtre", explique-t-il à Magharebia.

"L'Etat islamique est l'organisation terroriste la plus sanguinaire et la plus brutale. Ils glorifient les massacres et le meurtre et en font le cœur même de leur foi", ajoute-t-il.

Pour sa part, l'analyste et militant amazigh Boubaker Ounghir s'inquiète du fait que ce mouvement pro-EIIL au Maroc ne vienne créer des préoccupations sécuritaires jusqu'alors inconnues.

"Bien que ce mouvement représente une réelle menace pour tous les Marocains par suite de ses idées, qui autorisent le meurtre de chacun, les minorités ethniques et religieuses au Maroc seront les plus exposées à ces risques", explique-t-il à Magharebia.

En Syrie et en Irak, l'Etat islamique a essentiellement tourné ses fusils et ses couteaux contre les minorités kurdes et chrétiennes, souligne ce militant. Et il est fort probable que les partisans de ce groupe terroriste suivront la même tendance au Maroc.

Les militants amazighs ont déjà été visés par des fatwas appelant à répandre leur sang, rappelle-t-il. Les citoyens juifs et chrétiens sont également menacés.

Et si le nombre des récentes arrestations de terroristes peut fournir une indication, le danger est croissant.

Le Maroc a en effet enregistré une augmentation du nombre des éléments actifs de l'EIIL sur son territoire. Les magistrats de Salé ont été récemment surpris d'entendre des déclarations de militants marocains arrêtés en liaison avec les combats en Syrie.

Ces accusés ont en effet déclaré qu'ils considéraient la société marocaine comme hérétique et ne reconnaissaient pas la légitimité de ses tribunaux.

Une cellule avait également planifié des opérations terroristes au Maroc visant des sites militaires et de la sécurité, des intérêts économiques et étrangers, et plusieurs personnalités connues.

Ce report d'allégeance au bénéfice de l'EIIL se retrouve même dans les prisons.

Certains détenus dans des affaires terroristes, comme Mohamed Fartakh et Abdel Ilah Ahram, ont diffusé depuis leurs cellules des enregistrements audio dans lesquels ils déclarent leur allégeance à al-Baghdadi. Ces déclarations publiées sur les sites des réseaux sociaux ont été baptisées "Soutien marocain à l'Etat islamique".

Au cours du seul dernier mois, plusieurs autres arrestations ont montré que le royaume a des raisons de s'inquiéter. Un Marocain, ses deux jeunes filles et une femme avec laquelle il avait contracté un mariage "orfi" ont été arrêtés le 15 octobre avant de pouvoir rejoindre leurs contacts de l'Etat islamique à l'étranger.

Un autre suspect a été arrêté à Al-Hoceima pour avoir publié sur Internet des propos faisant l'apologie des "opérations terroristes sauvages" commises par l'EIIL en Irak et en Syrie, a indiqué le ministère de l'Intérieur.

Un autre homme encore, dans la trentaine, a été appréhendé à Oujda. Il avait prêté allégeance à l'EIIL et appelait sur Internet à mener des "opérations de destruction".

Il avait également passé dix ans en prison pour son rôle dans les attentats de Casablanca en 2003.

Face à de tels développements, le Maroc a relevé son niveau de vigilance à son maximum. La semaine dernière, le gouvernement a mis en place de nouvelles mesures de sécurité combinant l'armée, la police et les forces para-militaires.

Le pays n'est pas confronté au risque de menaces directes et tangibles dans un futur proche, mais prudence et vigilance sont néanmoins nécessaires face au terrorisme, a déclaré le ministre de l'Intérieur Mohamed Hassad.

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